De la terre ou des murs du bourg de Gençay furent mis à jour, au cours des ans plusieurs trésors. La mémoire écrite et orale relate au moins les trois suivants:
Dans le courant du mois d’octobre 1885, le sieur Martin, ouvrier maçon à Gençay, avait entrepris de faire un mur de soutènement en pierres sèches dans des terrains recouverts de démolitions, proches d’une galerie voûtée, dépendant de l’ancien château, allant de celui-ci à l’église. En enlevant les déblais pour établir des fondations, à un mètre environ de profondeur, il s’aperçut que les terres contenaient des pièces de monnaie. Dans une superficie d’environ deux pieds, il ramassa environ trois cents pièces de billons mélangés avec des ossements humains sans remarquer toutefois de traces de sépulture.
Selon M. Peuchaud, chef divisionnaire de la préfecture et numismate éminent qui examina les pièces:
«Les pièces, au nombre de 296, dont 286 deniers et 10 oboles, sont généralement mal conservées et très usées; elles ont longtemps circulé avant d’avoir été déposées dans la terre. Ne figure aucune piècee ssentiellement royale, ce qui démontre que le dépôt a dû être confié à la terre avant l’année 1226, date de l’avènement de Louis IX au trône».
Selon Alfred Richard, après l’expertise de M.Peuchaud:
«Il est difficile de déterminer d’une façon plus précise que ne l’a fait M. Peuchaud, la date de l’enfouissement de ces pièces ; elle se situe entre 1218 et 1272. Il est de plus certain qu’elles ne faisaient pas partie d’un trésor caché intentionnellement, elles devaient se trouver dansl a bourse d’une personne avec qui elles ont été enfouies accidentellement. Leurpossesseur a dû succomber pendant une de ces attaques à main armée auxquelles le château de Gençay a été souvent en butte, particulièrement pendant la période indiquée par les plus récentes de nos pièces; alors, il appartenait à Geoffroyde Rancon».
(Bull. Société des Antiquaires de l’Ouest, 1888,523-524)
L’invention d’un autre trésor nous est relatée avec la verve qu’on lui connaissait par Roland Barrat, qui était alors rédacteur en chef du journal le Libre Poitou, l’ancêtre de Centre-Presse:
«On a trouvé un trésor!» Mercredi en fin de matinée, la nouvelle courait dans Gençay. Personne ne voulait y croire, mais il fallut bien se rendre à l’évidence quand on apprit que M. Henri Gaud, entrepreneur de maçonnerie et ses ouvriers, MM. Armand Duclos, père de 4 enfants, Marcel Blusseau, père de 7 enfants et Pierre Bonvalet, étaient les «inventeurs» de cette découverte. On fut alors beaucoup plus discret, et l’on commença à parler sous cape. L’on interrogea: «Bah:  quelques pièces d’or», direntq uelques-uns. D’autres, plus curieux, avancèrent des chiffres! Quelques heures plus tard, on sut toute la vérité. 380 pièces d’or avaient été trouvées et accusaient le poids respectable de 3 kilos 200 grammes au total. Ce qui représente déjà une somme coquette.
COMMENT FUT DECOUVERT LE TRESOR
Mercredi matin, vers 10 heures, M. Henri Gaud était occupé avec ses employés au triage de moellons provenant d’un vieux mur, mitoyen avec une autre propriété. Ce travail avait été commandé par M. Olivier Robiou du Pont, l’un des propriétaires du mur, l’autre étant une demoiselle Roy. Il faisait froid, une bise aigre qui coupait la figure, soufflait, et de toute leur ardeur, maître et ouvriers maçons procédaient au déblaiement imposé à un certain moment. L’on fit écrouler un pan de mur, les ouvriers piochèrent et tout d'un coup, quelques pièces d’or apparurent. Les recherches furent poussées plus avant et dans une niche, l’on devait découvrir le trésor. Qui le trouva le premier, les quatre hommes étaient ensemble…
Trois cent quatre vingt pièces d’or grandes comme des pièces de cinquante francs, pesant aux environs de 3 grammes la pièce, ayant été faites à la main, car elles étaient du temps où l’on battait monnaie, étaient là. La plupart dataient du règne de Charles IX, quelques autres du règne de Fançois 1er. Un sac en toile de lin dont il ne restait que quelques morceaux les avait contenues.
Aussitôt, comme il se devait, les «inventeurs» - c’est la le terme que la loi applique à ceux qui découvrent un trésor – firent part de leur trouvaille aux propriétaires du mur mitoyen : M. Robiou du Pont et Mlle Roy.
En présence de M. Ingrandes, huissier, un constat fut fait. Les pièces furent placées sous scellés et M. Robiou du Pont s’occupa des formalités. Toutefois, la valeur des pièces peut être chiffrée entre 6 et 10000f rancs, ce qui donne au trésor une valeur approximative de 2500000 francs.
Indiquons pour terminer, que le partage du trésor deGençay n’interviendra que quand les formalités prévues par la loi serontdéfinitivement accomplies.
D’OU VIENT CE TRESOR?
Le mur où fut découvert «le trésor» est attenant àune vieille bâtisse qui ne sert plus aujourd’hui. Depuis des générations, cette maison appartient à la famille Robiou du Pont, apparentée au Dr Billaud, conseiller du canton de Gençay. M. Robiou, que nous avons vu, devait nous préciser, que depuis sa plus jeune enfance, il avait entendu parler d’unt résor caché dans les vieilles maisons de la rue de l’Aumônerie. Cette rue est l’artère principale du plus vieux quartier de Gençay.
Gençay, nous avons eu l’occasion de le signaler à maintes reprises, possède un passé historique glorieux. Rien d’étonnant, à ce que l’on trouve cachés dans ses ruines des vestiges de ce passé, mais aussi quelques précieuses reliques, ou encore un trésor comme celui dont nous venons de conter la brève histoire.
QUI CACHA DANS LE MUR LE TRESOR ?
Qui mit dans le mur les pièces d’or ? Cette question, on se l’est posée depuis deux jours à Gençay et dans les environs. Seuls les actes notariés peuvent dire qui était propriétaire de la maison à la date des pièces. Toutefois, tout porte à croire que les 380 pièces découvertes étaient le trésor d’un notaire royal, ascendant de la famille Robiou du Pont. A ce sujet, M. Robiou du Pont fait actuellement faire des recherches. Mais comme il s’agit là d’un travail difficile et délicat, il ne saura que dans quelques  semaines le fin mot de l’affaire.
Nous disions que la nouvelle de la découverte du trésor de Gençay s’était répandue. Comme à chaque affaire, il faut qu’il y ait un élément comique, on a pu voir dans les rues de la cité et plus particulièrement dans celle de la rue de l’Aumônerie, des gens inconnus qui, pendule en main, partaient à la recherche d’un autre trésor…plus problématique celui-là!...(…)

Roland BARRAT. Le Libre Poitou du 6janvier 1954.

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